Sur la photo: Valerie Lok, inf. clinicienne (à droite) et Serena Baffour, inf. clinicienne (à gauche)
PAR ANNIE-PIER COUTURE
Je crois que jamais la Journée Internationale des infirmières n’aura eu autant de signification qu’en ce temps de pandémie. Cette période où notre expertise infirmière révèle son caractère unique. Une expertise vitale. Essentielle. Irremplaçable.
Cette épidémie qui révèle l’ampleur des dommages de la pénurie qui sévit depuis tant d’années. Qui nous pousse dans nos derniers retranchements, mais qui force également une unicité plus grande et plus nécessaire que jamais.
Mes amies,
Mes collègues,
À toutes celles qui ont les mains qui craquent
Le dos qui brûle
Les jambes lourdes
Les pieds usés
Les yeux cernés
Le masque imprimé sur le nez
Merci
À toutes celles qui mettent leur vie de famille sur pause
Leurs loisirs en suspend
Leur santé à risque
Merci
À toutes celles qui ont un horaire chamboulé
Des fins de semaine qui ont cessé d’exister
Une vie dictée par un arrêté
Qui ne savent plus quel jour on est
Merci
À toutes celles qui vont porter leurs enfants aux services de garde d’urgence le cœur serré
Qui se coupent de leur famille pour les protéger
Qui vivent à l’écart de la société pour éviter de propager cet ennemi qui nous fait tous trembler
Qui ont contracté ce virus en étant au front pour vous soigner
Merci
À toutes celles qui dénoncent
Qui réclament
Qui refusent
Qui se mobilisent
Qui usent d’ingéniosité dans l’adversité
Qui nomment haut et fort ce qu’on n’ose jamais prononcer
Qui crient « Bas les masques » pour que cesse l’omerta trop longtemps toléré
Merci
À toutes celles qui guident, évaluent, dirigent et rassurent au bout du fil
Qui rédigent des protocoles à la vitesse grand V
Qui dépistent plus vite que leur ombre
Qui réorganisent des départements entiers
Qui mobilisent et encouragent leurs équipes pour maintenir ce rythme effréné
Qui utilisent la technologie pour permettre aux étudiantes de graduer
Merci
À toutes celles qui ont répondu « Je contribue » quand l’appel à l’aide a été lancé
À nos collègues retraitées qui sont revenues sans hésiter
À nos collègues qui orientent les « bras » venus de tout horizon pour aider
Qui guident leurs collègues dans le chaos des résidences pour personnes âgées
Qui accumulent les « toutes autres tâches connexes » afin que les patients aient droit à un minimum de dignité
Qui crient à l’aide, en vain, depuis tant d’années
Qui regardent les CHSLD s’embraser, le cœur brisé, devant cette tragédie annoncée
Qui portent à bout de bras, avec leurs collègues préposés, les soins complexes des plus vulnérables de notre société
Merci
À toutes celles qui ont pleuré avant d’avoir de l’équipement adéquat pour se protéger
Qui continuent de sourire derrière leur masque trop longtemps porté
Qui soutiennent le regard plus longtemps pour briser la froideur de leur visière
Qui font fi de la chaleur insoutenable des équipements de protection individuels
Qui tendent à leur patient une main gantée, empreinte d’humanité, pour un ultime au revoir dans une chambre esseulée
Merci
Que vous soyez auxiliaire
Gestionnaire
Praticienne
Technicienne
Clinicienne
Où que vous soyez
Où que vous soignez
Aujourd’hui et plus que jamais, je suis fière d’être infirmière et de soigner à vos côtés